Récit d'une journée pourrie [ou comment faire chier les gens en racontant sa vie de façon bien longue et détaillée]
Ma fac étant bloquée, certains de mes cours ont été déplacés
dans d’autres sites de la fac. Enfin bref, j’avais donc aujourd’hui mes premiers
cours depuis des mois, un TD puis un CM de littérature française qui avaient lieu à la
fac de médecine. Chaque fois que je reste aussi longtemps sans avoir cours, j'ai l'impression de revivre ma première rentrée des classes à la maternelle, où je m'étais accrochée à un poteau en hurlant "je veux pas aller à l'écoooooole!".
J’ai rêvé toute la nuit, en boucle, que je m'éveillais trop tard et que les cours étaient déjà finis.
Ce qui devait arriver arriva. Je me suis réveillée avec une sensation d’apocalypse
imminente, je tournai craintivement la tète vers mon radio réveil, pour voir mon
pressentiment se confirmer : 8h30! J’avais dû l'éteindre en dormant, ce qui m’arrive souvent, sauf que d’habitude je me réveille
quand même à l’heure. Je pensais arriver avant la fin de mon TD en partant à
9h30, mais ça n’était vraiment pas mon jour.
J’arrivai confiante, chantant faux et à tue-tête dans ma petite voiture rutilante et ronronnante, persuadée de trouver une place de parking rapidement. Bin au bout
du huitième ou neuvième tour de quartier, je ressemblais plutôt à ces fous du
volant qui passent au feu rouge et injurient sans raison pour se défouler («P*tain
de b*rdel de m*rde! Qu’est-ce qu'il fout là cet enc***é de piéton!!!»
[bin, oui, il traversait la route, et sur un passage piéton, qui plus est!
Tsss on n’a pas idée!]) Échevelée et avec une furieuse envie de
mordre, j’ai aperçu mon dernier espoir : un panneau, contenant des mots
suffisamment simples pour que ma pauvre cervelle engourdie par la rage puisse le
décrypter : «parking souterrain de la faculté de médecine : 3
places restantes», je fis donc pour la énième fois un magnifique
demi-tour en gueulant, créant comme à mon habitude un mini embouteillage, pour expliquer
ma situation désespérée au môssieur de l’interphone, qui me dit que
oui, je pouvais entrer, qu’il y avait bien un ascenseur, et qu’il m’ouvrait la
barrière tout de suite. Je rentrai donc dans ma voiture précipitamment (ma
vitre droite ne s’ouvrant plus) et me garai en vitesse. Il me restait quinze
minutes avant le début du CM.
Sauf que, malgré ma certaine habitude des parkings souterrains sordides, celui-ci me
sembla en détenir la palme : des portes partout, mais qui
menaient toutes à des escaliers, avec ma jambe capricieuse et
mon état de fatigue général il me fallait impérativement trouver l’ascenseur. Finalement, je
trouvais une porte, qui menait à une autre, puis à une autre, et je sortis, en
pleine crise d’angoisse dû à la claustrophobie et l’absence de présence humaine
dans le parking, et j’arrivai... devant des escaliers. Sauf que de ma place, je pouvais apercevoir en haut une touffe de cheveux et un regard
ahuri, et je me dis que c’était forcément un étudiant en lettres. Je grimpai
tant bien que mal les maudits escaliers en boitillant et m’élançai à la poursuite dudit étudiant, qui
était bien en lettres (comme quoi, il y a parfois du bon à stéréotyper) Mais
il marchait vite, donc je l’ai semé discrètement quand j’ai enfin trouvé l’ascenseur.
Et là, une bande d’étudiants de ma classe s’est jeté dans l’espace exigu
du vieil ascenseur, m’ayant repérée de loin grâce à mes cheveux. Mais nous
sommes partis dans la mauvaise
direction, et on a marché, marché, marché… jusqu’à ce qu’on nous dise «euh…
vous savez que vous êtes dans le bâtiment administratif?» Nous
sommes arrivés en retard, mais moins que l’étudiant à l’air ahuri qui ne trouva
la salle que vingt minutes plus tard, avec un petit regard de reproche dans ma
direction.
Mais le cours était intéressant, la prof est sympa, je n'étais pas toute seule et j’ai vu des gens, et ça,
ça faisait loooooogtemps, ce qui m’a permis de déverser un flot de paroles
ininterrompues à une étudiante fort sympathique qui m'écouta sans jamais se
plaindre décrire en long, en large et en travers ma passion pour Beethoven. (Ceci dit, peut-être que ça l’intéressait
réellement). Je me suis suicidée du haut d'un trottoir, et du coup, ça va mieux, j'ai sauvé ma journée.
J'espère quand même vraiment que ma fac sera débloquée très bientôt, ça me permettra d'avoir autre chose à raconter sur mon blog que mes journées de merde.